Diaspora, Développement et FinTech: 4 propositions for l’Agence Française de Développement
Lelapa a formulé en 2019 quatre propositions pour l’Agence Française de Développement qui favorisent une croissance partagée entre la France et l’Afrique.
Créer l’AFD Lab, interlocuteur unique entre les start-ups fintech orientées développement et les régulateurs de marchés financiers français et africains.
- Les intermédiaires fintech jouent un rôle tout particulier en Afrique où, souvent, les coûts de transaction sont à l’origine des défaillances des marchés financiers.
- A titre d’exemple, le « missing middle » des marchés de capitaux traduit le manque d’intermédiaires d’investissement entre la microfinance et le capital-risque. Cela empêche le développement des PME africaines alors que la demande interne est historiquement forte. En réduisant ces coûts de transaction, les fintech telles que les plateformes d’equity crowdfunding favorisent l’inclusion financière et par conséquent la croissance des PME africaines et l’emploi.
- Les services de remittances, de moyens de paiements, de produits d’assurance et de prêts entre particuliers représentent également des marchés potentiels importants pour les intermédiaires fintech.
- La réussite de ces innovations passe nécessairement par une adaptation des cadres réglementaires transfrontaliers dans lesquels ces intermédiaires évoluent. Pourtant, les start-ups françaises qui s’y sont lancées se trouvent aujourd’hui à jouer quasiment seules un véritable rôle de lobbying auprès des régulateurs alors que l’AFD est l’acteur par excellence pouvant les appuyer.
- Nous proposons d’établir un lien étroit entre l’AFD et l’AMF avec la création d’un AFD Lab dédié à tester des modèles innovants dans la fintech pour le développement. Les experts juridiques déjà impliqués dans le « sandbox fintech» de l’AMF seraient ainsi sensibilisés aux objectifs de l’AFD en matière de développement des marchés de capitaux africains et le potentiel des intermédiaires fintech.
- L’AFD Lab doit également établir un dialogue entre régulateurs africains et français et assurer la gestion de projets réglementaires bilatéraux et régionaux.
- Enfin, l’AFD Lab peut mobiliser tous les acteurs publics pertinents aux projets innovants : BPI France, l’ACPR, le Ministère des Affaires Etrangères, BusinessFrance, le Trésor, le pôle FINANCE INNOVATION et la place financière de Paris.
2. Dé-risquer les investissements dans la fintech de Proparco Venture Capital en s’appuyant sur les outils de subvention existants de l’AFD.
- Force est de constater que le bailleur de fonds français a pris du retard par rapport à ses homologues européens en matière de stratégie d’investissement dans les intermédiaires fintech.
- A titre d’exemple, DfID finance depuis 2014 des études et des travaux juridiques au sein des régulateurs africains sur les sujets fintech, tout en appuyant financièrement les start-ups locales et anglaises en Afrique de l’Est ; aux Pays Bas, la banque de développement FMO a lancé sa plateforme « FinForward » favorisant les joints ventures entre fintechs et institutions financières, notamment dans le secteur microfinance, tandis que la Dutch Good Growth Fund, elle, investit directement dans les intermédiaires fintech ; la Banque Européenne d’Investissement s’est dotée d’un fonds « Boost Africa » co-géré par la Banque Africaine de Développement, dont les capitaux peuvent être déployés à travers des plateformes d’investissement.
- La seule initiative française récente, le Fonds Franco-Africain (FFA) de Bpifrance et AfricInvest, ne dispose pas de mandat d’investissements directs d’amorçage, qu’il s’agisse des PME africaines ou des fintech. Un fonds de capital-risque classique, le FFA n’a pas vocation à investir à travers des intermédiaires fintech.
- Pour rattraper ce retard, nous proposons d’enrichir le futur véhicule de venture capital de Proparco à la fois d’une stratégie fintech et d’un mandat d’investissement avec une gamme d’outils complète et appropriée, avec, notamment, la possibilité d’associer des subventions classiques de l’AFD aux investissements en fonds propres.
3. Adapter le cadre réglementaire des plateformes de financement participatif transfrontalières France – Afrique.
- Les transferts de fonds des diasporas sont trois fois supérieurs à l’aide publique au développement. Pourtant, ils sont rarement dirigés vers des projets de développement.
- Les plateformes de financement participatif peuvent canaliser les financements de la diaspora (mais pas seulement) vers des PME africaines. Ces plateformes font rencontrer l’offre et la demande efficacement grâce à la numérisation des processus d’investissement et à la mutualisation des risques entre investisseurs de profils divers. Enfin, elles peuvent réduire fortement le coût d’investir ou de prêter à une PME africaine, par rapport aux intermédiaires traditionnels.
- Cohérent avec son ambition d’être la capitale de l’économie participative, la France pourrait être au cœur de ces échanges nord-sud.
- Nous proposons, en tant que projet de l’AFD Lab, de mettre en place un groupe de travail chargé de créer un cadre réglementaire approprié qui permet les investissements transfrontaliers. Ce cadre pourrait s’appuyer sur les travaux réglementaires effectués par l’African Crowdfunding Association, association à but non lucratif financée par DfID et chargée de développer un cadre réglementaire intra-africain pour le financement participatif en Afrique.
- Ce groupe de travail proposerait à l’AMF et à ses homologues africains des dérogations, voire des accords spécifiques, permettant d’adapter et de sécuriser le modèle d’investissement direct en ligne dans les PME africaines, de manière à ce que les coûts de transaction ne soient plus une barrière à l’inclusion financière.
- Le succès des plateformes numériques d’investissements transfrontaliers ouvrira de nouvelles possibilités pour l’AFD de financer ou subventionner, à l’échelle, la préparation à l’investissement des PME africaines. Cela est indispensable à la création de la « pipeline » future des PME de croissance, quelle que soit la technologie qui les permettra d’accéder aux marchés de capitaux privés ou publics.
4. Inciter l’investissement dans les PME africaines avec une défiscalisation labellisée « Diaspora4Dev »
- En s’inspirant des incitations fiscales destinées aux investisseurs dans les PME françaises, nous proposons de créer un nouveau dispositif labellisé « Diaspora4Dev » applicable aux investissements en fonds propres et en dette dans des PME africaines proposées sur les plateformesde financement participatiffrançaises agréés.
- Les PME africaines bénéficiaires répondraient à des critères de développement définis par l’AFD et contrôlés par les gestionnaires des plateformes : par exemple, l’impact social ou environnemental, le montant et le stade d’investissement, le produit ou service proposé, la géographie ou encore le profil démographique des consommateurs du produit ou service.
- L’AFD pourrait amortir davantage le risque en investissant directement aux côtés des particuliers sur plateformes avec des outils financiers divers : des prêts à taux zéro, subventions, fonds propres (via Proparco).